Canalblog
Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Les divagations d'un jeune homme solitaire

9 décembre 2012

Destinée page 15

Il y avait aussi deux filles d’origine marocaines portant le même prénom.  L’une portait le voile, elle était marié à un turc et expliquait en quoi un mariage turco-marocain était clairement un mariage mixte entre deux cultures différentes.  L’autre était sans voile et divorcée, elle élevait seule ses deux enfants dont l’un était autiste.

 Une autre marocaine, musulmane des pieds à la tête, avait les nerfs à vif et partait en vrille en moins de temps qu’il n’en fallait pour le dire.

 Deux filles venaient tout droit du centre de l’Afrique, l’une d’entre elles avait travaillé dans son pays dans le domaine des assurances, l’autre avait fait de longues études universitaires.  Elles étaient venues en Europe, étaient reparties de zéro avaient du affronter la fraîcheur du climat et de l’accueil de certains de nos concitoyens mais quand elles parvenaient à travailler, elles pouvaient à elles seules nourrir plusieurs villages africains.

 Enfin il y avait un homme noir à la barbe blanche qui avait dérivé entre plusieurs vies, plusieurs pays, plusieurs femmes au cours de son existence et qui observait sagement les choses. 

 Depuis quelques temps, j’observais avec consternation l’état de la société qui fonçait à vive allure contre un mur alors que la plupart des gens vivaient centrés sur leur nombril.  Après un long moment d’observation c’est cette année là que je rejoignis les rangs de ceux qui pensaient à un avenir différent, les rangs de l’écologie politique. 

  Après la formation, j’ai effectué un stage dans le service scan de l’administration gérant l’emploi ou plutôt le chômage qui dévastait le pays.  Les gens qui travaillaient là donnaient l’impression de n’avoir qu’un demi-cerveau.  Ils étaient centrés sur leur petite vie et sur le cul. 

Ils faisaient penser plus à des ectoplasmes mous qu’à des êtres humains doués de pensées. 

Un jour les candidatures que j’envoyais par paquets m’amenèrent dans un syndicat rouge.  Ce que ma très bourgeoise famille considérait comme un ennemi de classe.  La première fois ont me fis faire quelques tests informatique, parmi une foule d’autres candidats.   Puis quelques temps après, je fus convoqué chez le chef du service qui engageait.  Il fût ravi par les mots que je prononçais sur l’individualisme rongeant la société et malgré le fait que je dis que je n’avais jamais été membre d’aucun syndicat, je reçus un coup de téléphone quelques temps après m’annonçant que j’étais engagé.  Et c’est comme un souffle chaud qui réchauffait un cœur glacé.  Le fait de pouvoir rentrer dans une case, de pouvoir répondre quelque chose à la sempiternelle question de ce que je fais dans la vie me plongeait dans une allégresse étrange pour un contrat de remplacement de six mois.     

Au cours de ces six mois, j’ai participé à plusieurs manifestations, dont une  le deuxième jour de travail.  Vêtus de rouge, armés de banderoles, nous défilions gaiement  pour que les ouvriers ici ou là aient un travail décent.  Ces ouvriers que ma famille considérait comme des simples outils et que je me mettais à défendre.  L’une des dernières manifestations, nous étions déguisés en vieillard, un de nous portait un masque à l’effigie du ministre des pensions et faisait semblant de nous fouetter. 

 

Publicité
Publicité
25 novembre 2012

Destinée page 14

Je cherchais ma vie, je multipliais les envois de courriers pour postuler à l’un ou l’autre emploi.  Je me posais aussi des questions sur ce monde qui ne tournait pas rond.  Je voyais les entretiens d’embauche comme des performances théâtrale consistant à jouer le rôle de la personne enthousiaste à entrer dans une structure.  Un jour, je fus convoqué dans un grand bâtiment sans âme, dans un quartier de bureaux, où mes gens arrivaient comme des abeilles venant à la ruche le matin et qui était déserté en fin d’après-midi.   On m’amena devant trois personnes et je répondis les bonnes réponses du bon petit soldat.  Quelques semaines plus tard, je reçus une lettre me disant que j’avais été sélectionné pour le poste et me demandant de contacter le service du personnel.

 

Quelques jours plus tard, je commençais une longue période d’ennui dans un petit bureau au fond d’un couloir blanc.  Les gens là passaient leur temps à écumer des réunions d’organismes aux acronymes  variés qui leur flattaient leur ego et leur donnaient une certaine importance.  Quand je demandais quel était l’objet de tous ces groupes, on me répondait que je me posais trop de questions et qu’il suffisait que je fasse ce qu’il m’était demandé comme un automate. 

 

Plongé dans une solitude forcée, bientôt des idées sombres envahirent mon esprit.  Un jour on me dit qu’il semblerait que le poste ne soit pas fait pour moi et qu’il vaudrait mieux que l’on cesse ce chemin.  Curieusement alors que ce licenciement était salvateur, il fit plonger ma morosité encore plus profondément de façon temporaire.  Le soir même j’essayais vainement de m’étrangler avec une ceinture afin que cette vie finisse. 

 

Puis je me mis à rebondir, cherchant une formation qui pourra m’aider dans ce rebonds, j’atterris dans le centre régional s’occupant de la formation des demandeurs d’emploi.  J’arrivai dans un groupe où la moitié des gens venaient d’Afrique noire et venaient de débarquer dans le pays, l’autre moitié étaient constituée de gens dont les parents avaient quitté le Maroc.   Principalement c’était des femmes. 

 

Passons en revue certains des personnages marquants de cet épisode de ma vie.  Il y avait une fille blonde aux yeux bleus, bien que la couleur de ces cheveux était quelque chose qu’on ne pouvait qu’imaginer.  Elle racontait s’être convertie à l’islam et s’être radicalisée après une vie qu’elle aurait pu qualifier de débauche.  Elle était vêtue de longues tuniques tantôt aux couleurs chatoyante, tantôt sombre à faire peur.  Elle portait ces tenues prés du corps et on devinait une silhouette filiforme.  Elle n’avait que peu travaillé et avait enchaîné les formations ce qui faisait d’elle quelqu’un de théoriquement hyper qualifiée.  Elle appliquait des règles strictes de vie qu’elle imposait à ses enfants, comme le fait de leur interdire d’aller à des anniversaires car ce serait contre l’islam.  

 

On pouvait également rencontrer un garçon qui affichait sans honte son homosexualité.  Il  avait été marié, est était divorcé, avec un autre garçon.  Ce mariage tenait plus du militantisme que de la volonté d’avoir une vie de couple.  Chaque lundi, on avait droit à une description détaillée de ses soirées orgiaques et il valait mieux que les oreilles chastes s’éloignent. 

 

 

4 novembre 2012

Destinée page 13

Le résultat des examens fût moins catastrophique que l’épisode universitaire qui a suivi directement mon école secondaire mais il se solda tout de même sur un échec.  N’ayant pas envie de m’embourber à nouveau dans des redoublements, j’arrêtais là ce chapitre de ma vie. 

 

A l’approche des élections communales, je mis en place un blog où je décortiquais les divers tracts se retrouvant dans ma boîte aux lettres.  Je fis aussi des recherches sur internet à propos des différentes personnes se présentant aux suffrages.  Je sillonnais la commune armé d’un appareil photo pour voir de prés les différents endroits stratégiques, les principaux enjeux de ces élections communales.  Enfin j’ai envoyé un questionnaire aux différentes têtes de liste.  J’ai toujours trouvé un peu bête de voter sans connaissance de cause.  Peut-être que mon initiative d’alors a permis a quelques personnes d’avoir une vue plus éclairée sur le scrutin.

 

Au milieu de l’été, je déménageais verticalement en m’installant au cinquième étage de l’immeuble dans lequel j’habitais.  Le félin avec lequel j’habitais eut du mal à supporter cette montée à être pris au piège en hauteur.  Un jour de pluie, ses miaulements intempestifs m’amenèrent  à lui ouvrir la porte de la terrasse.  Il se mit à marcher sur les bords du gouffre, dérapa  et s’écrasa trente mètres plus bas sur une dalle.  La chute fût fatale ainsi mourut un être libre qu’on voulait transformer en animal de compagnie.  Quelques mois après, ma tante m’apporta un petit chaton blanc qui est mon compagnon de vie jusqu’à présent. 

 

En septembre, je me suis décidé à reprendre des études de bibliothécaire-documentaliste en cours du soir afin d’obtenir ce satané graduat.  Les cours se faisaient dans un grand bâtiment aux espaces perdus, occupé également par le conservatoire de Bruxelles.

.

 

Les gens qui suivaient ces cours avaient connu d’autres vies, faites de haut de bas, de courbes sinueuses qui les amenaient là en tâtonnant dans l’existence.  On trouvait là des gens ayant navigué de petits boulots en petits boulots.  Les enseignements ressemblaient de prés à ce que j’avais entendu ailleurs mais l’environnement était moins cadré. 

 

Comme un bon petit qui suivait bien les consignes, je bouclais les travaux, étudiais les leçons, réussissais à passer dans la classe supérieure sans brio mais sans catastrophe.  Arrivé le moment de concevoir un mémoire et là j’échouais sur le même obstacle que jadis.  Mais là où autrefois le professeur promoteur était très présent, mais d’une présence négative qui enfonçait plutôt qu’elle encourageait.  Ici c’était un promoteur absent qui préférait ingurgiter des litres de bières spéciales plutôt que de faire son métier. 

 

Je me trouvais une dernière fois derrière le comptoir de prêt d’une bibliothèque pendant trois semaines au mois de juin.  Pour le  remplacement d’un mi-temps à l’autre bout de la ville.  Le trajet me prenait presque plus de temps que celui passé sur place.  

 

Je fréquentais assidument les plateaux de tournage des différents films tournés dans ma ville.  Que ce soit des courts métrages d’étudiants jusqu’aux grosses productions.  Chaque film dans lequel on était plongé était un autre univers.  Parfois de longues périodes d’attente et d’ennui pour quelques minutes de tournage.  Parfois pour simplement passer en rue, parfois pour des scènes plus cocasses.  Pour un court-métrage par exemple, je devais faire un pompier jeté à terre par le souffle d’une explosion, pour un autre film, je me trouvais dans un habit du XIXe siècle dans un vieil auditoire.

 

1 novembre 2012

Destinée partie 12

Un jour, on trouva un chaton qui s’était accroché à la clôture voisine de la bibliothèque.

J’adoptai ce gamin des rues un peu turbulent.  Il sortait de chez moi par la fenêtre et revenait avec des souris ou des oiseaux plein la gueule.  Quand je revenais le soir, il venait à ma rencontre, sortant du bois en face de mon immeuble. 

 

 

Un an, jour pour jour, après avoir commencé à la bibliothèque, mon contrat s’y acheva.  Après une poignée  de mois, je fus engagé pour un remplacement dans la bibliothèque d’une école d’architecture.  Un temps émerveillé par certaines belles demoiselles qui avait un cours à cet endroit,  je suis allé au bal organisé par les étudiants pour bouger prés d’elles le temps d’une soirée.

 

Ensuite,  j’arrivais pour la première fois dans une période de vide, de doute et d’incertitude véritable.    Je tournais en rond dans mon petit appartement, j’essayais d’inventer ma vie, de trouver comment me dépêtrer du marécage dans lequel je pataugeais. 

 

Le bureau de chômage se trouvait dans un quartier où des femmes exposaient leur charme en vitrine comme un produit de consommation.  Un jour je suis entré chez l’une d’elle.  Ces femmes sont les seules qui m’ont fait connaître quelques moments de tendresse, de douceur, de plaisir sexuel.  Je n’en tire pas fierté, j’ai même une certaine honte parfois pensant que certaine d’elles étaient l’objet de réseaux mafieux.  En sortant de là, il m’arrivant d’être très mal mais souvent ces demoiselles m’ont mis du baume au cœur.  Chacune de leur caresse, en ces brefs moments, était comme un pansement sur une âme blessée.

 

Cet été là, pour la première fois, j’ai fait de la figuration sur le tournage de films.  En répondant bêtement à une annonce, je me suis retrouvé dans une épicerie à faire le client pour un court métrage puis quelques jours après je me suis trouvé dans une foule sur la place centrale d’une ville ancienne à agiter des drapeaux pour une comédie sur  la royauté.  

 

Il m’est arrivé dans ces années là de partir seul à la découverte d’un pays.  Une année au Portugal, une année en Irlande.  Je dormais dans  les auberges de jeunesse, prenait des bus entre les villes.  Je faisais des rencontres insolites.  Une jeune suédoise rencontrée dans un concert de rock dans un pub dans l’ouest de l’Irlande.  Un vieil irlandais me parlant dix minutes en gaélique dans un bus, sans se rendre compte que je ne comprenais pas un mot.  De jeunes capverdiens venus faire la fête dans le sud du Portugal….

 

En septembre, je me suis décidé à reprendre des études universitaires à mettre un cap à ma vie qui dérivait doucement comme une coque de noix ballotée par les flots déchaînés de la mer du destin.    C’était une université à dimension humaine, située au cœur de la ville.  Je me suis inscrit en première année de droit.  Le droit étant l’ensemble des règles qui coordonne le grand jeu de la vie en société, sa connaissance peut être utile si l’on veut pouvoir mieux vivre dans ce monde.  

 

Je passais du temps sur internet à discuter avec les étudiants des cours du jour à travers leur forum.  Je prenais plaisir à me mêler à différents débats où les jeunes étudiants prenaient des positions très clivées, très théoriques où l’idéologie prenait le pas sur l’expérience.

25 octobre 2012

Destinée partie 11

 

Une belle à la peau d’ébène m’entraîna plus loin, dans un coin tranquille.  Elle me parlait doucement à l’oreille.  Le sens des paroles n’avait aucune importance mais c’était comme une douce caresse au creux de mon oreille.  Puis elle m’entraîna danser collé-serré jusqu’à ce qu’une explosion de plaisir mouilla mon pantalon.  La note que je reçu quelques minutes après a été une brusque retombée sur terre.    

 

Dans mon enfance, ma marraine me fît découvrir le monde des bibliothèques et celui du cinéma, deux univers qui resteront important dans ma vie.  Elle m’emmenait le samedi matin avec ses enfants fouiller à travers les trésors contenus dans la bibliothèque de notre quartier.  Comme elle m’emmenait aussi m’évader devant les merveilles du 7e art. 

 

Après quelques semaines de recherche d’emploi, je fus engagé dans la bibliothèque qui abritait les souvenirs des samedis de mon enfance, gardant pour un temps l’illusion que tout serait toujours facile. La bibliothèque était nichée dans une vieille bâtisse qui avait du être la demeure d’un notable important dans un passé lointain.  Pendant une année, je vis donc défiler les amoureux de livres du quartier, guidés sur les chemins de la bibliothèque par une soif de connaissance ou une envie d’évasion. 

 

Le personnel de la bibliothèque était composé de six personnes en plus de moi.  La directrice était diminuée par la maladie, elle ne se déplaçait plus qu’en fauteuil roulant.  Elle ne venait que deux jours par semaine, elle se faisait monter à dos d’homme et restait enfermée dans son bureau jusqu’au soir.  Elle provoquait d temps à autres des réunions qui n’aboutissaient à aucune décision formelle mais qui lui permettait d’avoir un sentiment d’utilité. 

 

Il y a avait un seul autre homme dans le personnel, toujours vêtu de noir c’était aussi un peu la couleur de son humeur.  Il se remémorait le temps de sa jeunesse où il jouait dans un groupe de rock se produisant ici ou là.  Il avait une passion pour la littérature japonaise dont il mettait les auteurs en valeur dans la bibliothèque. 

 

Deux des filles travaillant là avaient le même prénom mais différaient pour tout le reste.  L’une était responsable de la section jeunesse, elle était passionnée par cette fonction qui la prenait entièrement.  Elle était impliquée politiquement dans sa commune voisine de la mienne où elle siégeait au conseil communal. Pendant son temps libre, elle suivait des cours de chant et parfois quand on arrivait tôt à la bibliothèque, on entendait un air d’opéra remplir l’espace.

 

L’autre était mal dans sa peau, fragile comme de la porcelaine, elle laissait son cœur balloté entre les mains de mâles plus ou moins mal intentionnés qui répandait sur elle des bruits odieux.

 

On trouvait aussi là un personnage un peu effacé, qui arrivait le matin, et patientait toute la journée jusqu’au moment où elle pouvait repartir le soir.

 

Une femme de ménage déblatérant un flot continu de propos raciste complétait le tableau.  

 

On eut une stagiaire quelques semaines dont la beauté m’obsédait.  Elle semblait occuper tout le champ de vision.  Tout ce qui l’entourait semblait devenir plus flou.  Elle devenait le centre de tout, puis elle disparut aussi fugacement qu’elle était apparue.

 

Publicité
Publicité
25 octobre 2012

Destinée partie 10

 

Je partis quelques jours dans le sud-ouest de la France, dans ces villages en dehors du temps pour prendre une grande bouffée d’oxygène avant de replonger dans le marasme quotidien. 

Pendant un mois, on m’occupât à faire des photocopies dans un obscur service universitaire.

Je finis par trouver un emploi pour la durée de l’été dans une bibliothèque du nord de la ville.  Cette bibliothèque était installée dans l’ancienne maison communale d’une entité engloutie  par sa puissante voisine plus de 80 ans plus tôt.  Ce vaste bâtiment était donc occupé par la bibliothèque, par une école que certains pourraient qualifier de poubelle et de quelques services administratifs, reliquats de la première destination du bâtiment.  

 

 

Parmi le personnel, on trouvait une polonaise alcoolique qui laissait un flot d’injures et de propos incohérent sortir de sa bouche dés que quelqu’un l’approchait.  Il y avait une hiérarchie parmi les employés de la bibliothèque et chacun gardait jalousement son petit pouvoir ridicule et considérait les autres comme des adversaires pouvant accaparer ce pouvoir.

 

En même temps que moi deux autres jeunes étaient engagés pour l’été afin de remplacer les vacanciers.  Une d’elle avait fait ses études de bibliothécaires prés de Namur.  Elle s’est fait draguer par un ouvrier communal qui venait à la bibliothèque avec des roses pour elle et son teint prenait alors la couleur des pivoines.  Elle était un peu perdue, ne voyait pas bien comment se dessinait son avenir.  Situation qui s’approchait  de la mienne.

 

L’autre avait suivi les cours avec moi.  Elle transportait la joie de vivre, la légèreté partout avec elle.  Son sourire pouvait à lui seul faire disparaître les nuages qui pouvaient assombrir les humeurs des gens.  

 

Cet été là, je quittais la maison qui avait accueillie mon enfance.   Toute la famille devait la quitter à terme, soufflée par la bourrasque qui emportait le couple de mes parents.  Je me retrouvais dans une pièce au rez-de-chaussée d’un immeuble dans lequel habitait ma grand-mère.     

 

Cet été là, durant un week-end caniculaire j’ai été à Paris avec un ancien camarade de classe de l’école secondaire.  La famille avait un appartement au pied de la butte Montmartre.  Reste des temps où mes ancêtres vivaient là, essayant de suivre leurs idoles, les Monet, Manet, Renoir, Degas ou Van Gogh.  Dressant leur chevalet un peu partout sur cette colline, puis plus loin à la campagne, peignant  paysages et portraits. 

 

Mon compagnon du week-end était une personne mal dans sa peau, qui tout d’un coup pouvait se mettre à délirer en propos incohérent, qui n’avait pas une haute image de lui-même qui avait sans arrêt été démoli par sa mère, qui n’était plus qu’un suiveur, incapable de la moindre pensée personnelle.  

 

Un soir, nous passâmes sur le boulevard de Clichy, un homme à l’air de conspirateur nous aborda.  Il nous entraîna à l’intérieur d’un cabaret sans que nous ayons à y réfléchir davantage. Nous nous sommes installés dans la pénombre, devant nous on apercevait des silhouettes féminines se trémoussant voluptueusement.  Deux d’entre elles vinrent s’asseoir prés de nous. 

25 octobre 2012

Destinée partie 9

Je finissais donc mon stage à pousser un chariot dans une bibliothèque médicale.  J’ai eu après le coup moral de mon éviction de mon stage, quelques témoignages de sympathie.  Notamment d’une fille blonde qui était dans la même classe que moi.  Autant dire tout de suite son charme ne m’était pas paru comme évident avant qu’elle m’écrive quelques mots gentils.  Après cela la moindre de ses attitude la façon dont elle se tenait la tête en faisant pendre ses cheveux, ses sourires, tout me faisait soudainement chavirer.  Je me suis mis à lui faire des déclarations enflammées par écrans interposés, n’osant jamais rien faire de vive voix.  J’ai fini par la déranger tant et si bien que les doux mots de réconfort du début devinrent secs et cassants après quelques semaines. 

 

A la fin de la deuxième année, les étudiants bibliothécaires devaient faire un exposé sur leur projet de mémoire devant les trois professeurs de pratique professionnel. Souvent le projet ne correspondait pas aux attentes des trois personnages et, dans ce cas là, elles prenaient un malin plaisir à transformer ce moment en une séance d’humiliation publique.  On avait d’ailleurs la désagréable impression que ce n’était pas le travail mais la personnalité de l’élève elle-même qui était visée par les sarcasmes des trois sorcières.  

 

Cet été là, nous sommes partis en vacances mon frère, ma sœur et moi avec mon père et sa nouvelle compagne.  Ce moment de fausseté ne devait plus se produire dans l’avenir. Et nous finirons par ne voir notre père que de temps en temps et après leur cinq premières de vie commune nous ne serions plus les bienvenus dans leur lieu de vie   et nous ne verrons notre père qu’à l’extérieur. 

 

Je devais ensuite recommencer ma deuxième année, tout au long de cette année les consignes des divers travaux que nous devions effectuer changer et s’accumulaient.  Nous étions comme les cobayes d’une expérience sociologique, quand allions-nous craquer ?  A la fin de cette année les trois sorcières me firent passer pour mieux m’abattre une année plus tard, comme un chat qui aime jouer avec une souris avant de lui porter le coup fatal.  

 

Pour ce mémoire, je me plongeais avec passion dans les archives de l’université, découvrant les écrits des générations précédentes. Des écrits datant de l’époque où les étudiants avaient l’illusion de pouvoir changer le monde. 

 

Un jour de septembre en revenant chez moi, je vis ma famille abasourdie devant la télévision,  regardant les images passant en boucle d’avions percutant des tours.  Le monde entrait avec fracas dans une nouvelle ère dominée par la peur, le repli sur soi et la violence.  

 

 

Après quelques mois passés dans les archives, une des sorcières vint me dire que mon travail n’était pas assez rigoureux, qu’il était impossible que je puisse être diplômé. Je sortis de là titubant, avec la volonté de me jeter sous le premier métro mais finalement je me suis résigné à vivre malgré tout. 

25 octobre 2012

Destinée partie 8

Contre toute attente, je réussis cette année.  Pas avec passion et acharnement mais un peu par hasard.  Quoi que la description de bouquins, en utilisant tout un tas de signes mystérieux pour le profane pouvait avoir un certain charme dans un premier temps. 

 

Comme après ma rhéto, mes parents m’envoyèrent cet été là suivre des cours d’anglais à l’étranger.  Cette fois c’est la capitale de l’Ecosse qui fût choisie.  J’ai fréquenté quelques semaines les couloirs de l’université d’Edimbourg et les pubs environnants.

 

J’étais logé chez un couple de personnes âgées vivant dans leur porcelaine, d’humeur acariâtre détestant être dérangé mais louant leur étage à de jeunes gens envoyés à l’étranger par leurs parents.  Que ne ferait-on pas pour arrondir ses fins de mois ?   

 

Le festival d’Edimbourg se déroulait à cette date et j’évoluais donc entre les spectacles de théâtre de rue qui foisonne dans cette ville durant cette quinzaine.  Tous les soirs, les jeunes étudiants que nous étions se retrouvaient dans un pub ou l’autre. Je me laissais entraîner dans l’allégresse.  Les derniers soirs étaient plus calmes, je ne retrouvais plus la diaspora d’étudiants étrangers.  J’allais dans un de ces pubs à deux étages où on dansait, je ne retrouvais aucune tête connue, quand je suis sorti j’ai entendu une voix de fille à l’accent écossais dire «hé guy come here ».  J’ai continué mon chemin peut-être que si je ne l’avais pas fait j’aurai connu une soirée de délices.  Mais avec des « si » on peut mettre Paris en bouteille.

 

Un mois avant mon séjour en Ecosse, ce sont déroulés mes dernières vacances familiales.  Nous avons navigués dans les eaux de l’océan indien entre les îles de l’archipel des Seychelles.  Nous avons vu les énormes tortues trimbaler cahin-caha leur énorme carapace centenaire le long des plages.  Nous nous sommes aventurés dans des oasis de verdure, des forêts luxuriantes.  Nous avons vu dans les quelques villes des temples hindous, véritable feux d’artifice de couleurs.   

 

Un soir d’automne, apparemment comme tous les autres, notre famille explosa.  Sans que l’on ne comprenne rien au premier abord, mon père fût jeté du domicile conjugal.  Les explications qu’on eut par la suite étaient celle d’une histoire affreusement  banal  « j’ai eu une aventure », enfin un « j’ai glissé chef » à la septième compagnie aurait été plus drôle mais bon personne n’était d’humeur à rire.  

 

Chaque année les étudiants bibliothécaire-documentaliste doivent faire un stage en milieu professionnel.  Mon stage avait lieu au centre de documentation du quotidien le plus lu du pays.  J’étais un peu perdu, je ne savais que faire, au milieu du stage, sans aucun avertissement préalable, on m’a signifié l’arrêt du stage car je ralentissais l’équipe.  Je suis parti, une grosse boule d’angoisse au fond de la gorge.  Persuadé que j’étais définitivement inapte à la vie, la tentation de me jeter sous un métro était grande.  Mais la seule pensée de ma mère en larmes m’a arrêté.  Je suis revenu chez moi l’air hagard,  deux jours plus tard j’avais un autre stage mais ça ne suffirait pas pour me sauver cette année. 

 

25 octobre 2012

Destinée partie 7

Après cette soirée, j’ai décidé de mettre un terme à ces joyeusetés.  Je me sentais isolé dans la masse. Les semaines à l’université étaient rythmées par des soirées bibitives où j’allais avec d’anciennes connaissances de l’athénée onduler du bassin dans un entrepôt sous une pluie de verres de bières.

 

Les sessions d’examens étaient des désastres  que j’essayais de noyer dans l’alcool au point d’avoir du mal à mettre un pied devant l’autre.   Lors de ces soirées l’alcool me faisait entrer dans un monde plus trouble, plus brumeux dont je n’avais que de vague souvenir ensuite. 

 

Après avoir échoué à la deuxième session d’examen je parti pour une traversée de la Manche avec mon père et mon grand-père.  Après cette traversée qui fût peu propice à la réflexion, je me réinscrivais dans cette même filière où j’avais échoué.  Le vague à l’âme qui montait en moi m’apportait une vision très négative de moi-même et m’empêchais d’avoir un recul, une remise en question qui aurait pu être saine. 

 

Un jour avant mon vingtième anniversaire, j’avalais toute une tablette de somnifères.  Le lendemain je me lève un peu groggy, je vais machinalement à la gare j’attends le train je tombe sur la voie, je me relève blessé quelque peu au genou pour prendre le train et arriver à l’heure aux cours.  Cette tentative de suicide, appelons les choses par leur nom, me laissa physiquement indemne à part une cicatrice au genou qui mis quelques semaines à disparaître, mon corps devant être plus solide que mon esprit.   

 

En découvrant cela, mes parents m’ont emmené voir quelqu’un.  Cela se passe ainsi dans la bourgeoisie, quand on se sent déprimé, on n’en parle pas en famille.  En famille seul le sourire est de bon ton, on va voir quelqu’un.  Le quelqu’un exerce une profession dont le préfixe est psy-, qui consiste à vous écouter contre rémunération.  Je ne pense pas que les autres catégories sociales sont moins hypocrites, elles sont plus pauvres donc cela passe par d’autre biais, celui de la religion notamment. 

 

Je travers l’année qui suivit comme un robot, me levant, allant aux cours, mangeant, buvant, dormant, en faisant même semblant parfois de faire la fête, mécaniquement sans joie.  Une année comme un tunnel qui aboutit au même échec que l’année précédente. 

 

Comme je me suis de tout temps réfugié dans les livres, j’entendis l’une ou l’autre personne me conseiller de faire une formation de bibliothécaire.  Je découvris à mon grand désarroi  que ce n’était pas l’amour des mots qui primait là mais le fait de classer tout et n’importe quoi.

 

L’école se trouvaient dans deux bâtiments joints de manière surprenante, la partie de gauche était un ancien hôtel de maître datant probablement de la fin du XIXe siècle avec des ferronneries travaillés, des escaliers en colimaçons qui pouvait rappeler certaines œuvres d’Horta , si on traversait un couloir , on arrivait dans un austère bâtiment des années 1960, d’une laideur fonctionnelle. Un jardin y était attenant et l’on pouvait y goûter de bons moments aux premiers rayons de soleil.      

 

Les étudiants ici avaient déjà vécu, ils avaient été confronté au doute, à l’échec, ils savaient plus ou moins consciemment que la vie n’était pas  forcément une route en ligne droite, qu’elle pouvait être sinueuse ou même marécageuse.  Ils étaient nettement plus intéressants que les blancs-becs plein d’arrogances, d’autosuffisance  et de bières que l’on pouvait croiser sur les campus universitaires. 

25 octobre 2012

Destinée partie 6

L’été qui suivit la sortie de mon école secondaire mes parents m’envoyèrent un mois aux Etats-Unis.  Dans une école chargée d’instruire la langue de Shakespeare aux jeunes étrangers qui n’avaient pas eu le bon goût de naître anglophone.

 

On dormait dans des résidences d’étudiants, où on logeait à plusieurs par chambre.    La résidence en question se trouvait à Boston dans un ancien immeuble proche de la rivière à deux pas du Capitole du Massachussets qui domine la ville de sa coupole  dorée.

 

L’école se trouvait dans la commune voisine de Cambridge, au premier étage d’une galerie commerçante, juste en face de la prestigieuse université d’Harvard.  Il y avait là une fraction de la jeunesse du monde entier, un joyeux melting pot, des filles d’une beauté à couper le souffle.

 

Le week-end des excursions étaient organisées, on a par exemple été visiter New York et Montréal, deux villes à égales distance de Boston.  Je revins un soir d’un de ces week-end à l’arrière d’un minibus en compagnie de deux belles brésiliennes.  J’étais à moitié endormi et je les entendis avec des petits rires de grelots dirent « look , he is excited » en désignant la bosse qui se formait dans mon bermuda mais cela n’a pas été plus loin.    

 

Sans y réfléchir abondamment, je suis ensuite allé à l’université.  La réflexion bien courte, bien superficielle concernait le type d’étude mais pas l’université.  Il était aberrant qu’on n’aille pas à l’université venant de notre milieu.

 

Je me suis retrouvé donc dans des auditoires d’une masse humaine assez informe se bousculant dans les auditoires d’où ressortiraient ceux que le système choisissait pour élite.  

En attendant de diriger le monde, cette élite beuglait sur les bleus, comme étaient baptisés les nouveaux venus dans le monde universitaire.

 

Les bleus qui jouaient le jeu de ce folklore moyenâgeux passaient le temps accroupis, étaient enivrés par des litres de houblons, n’étaient plus que des jouets  dans les mains d’irresponsables âgés d’une ou deux années de plus. 

 

J’ai participé à trois de ces activités ethilico-folkloristes.  Lors de la première de celle-ci, les nouveaux étudiants devaient avancer à quatre pattes par groupe de deux ou trois dans un entrepôt où le président de baptême faisait un discours abscons, où on nous faisait   machouiller une feuille de laurier symbole de ce cercle d’étudiants et où on nous donnait un surnom .  On m’a surnommé du nom d’un milliardaire américain qui avait fait sa fortune dans l’informatique.  Ces gaillards imbibés avaient trouvé une ressemblance physique avec moi.  Ils me rasèrent ensuite une bande de cheveux  au milieu du crâne qu’ils nommèrent l’autoroute de l’information en rapport encore une fois à ce personnage.   

 

La deuxième était juste une course de cuistax qu’on regardait en s’alcoolisant .

 

La troisième activité  a vu les bleus de la faculté marcher à quatre pattes entre les travées ‘un auditoire conduits comme des moutons.  On m’appela ensuite avec quelques autres à venir sur l’estrade, je fus vite nu.   On amena une fille qui devait tenir mon sexe pendant que je devais faire des flexions.  C’était la première fois que quelqu’un d’autre que moi touchait cette partie de mon corps.

Publicité
Publicité
1 2 > >>
Les divagations d'un jeune homme solitaire
Publicité
Archives
Publicité